Newsletter 2020.01
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AERONAUTIQUE
Alice, « un enjeu industriel majeur pour Multiplast »
Présenté au Salon du Bourget en juin 2019, le premier prototype d’Alice, avion électrique à passagers (neuf, plus deux membres d’équipage), développé par la société israélienne Eviation Aircraft, a vu le jour chez Multiplast.
Le chantier vannetais a en effet fabriqué le fuselage, tout en carbone, mais également procédé à l’assemblage, après avoir reçu les ailes de Singapour, les moteurs électriques d’Australie, les aménagements d’Espagne et du Portugal, l’empennage d’Angleterre.
« Entre le moment où nous nous sommes rencontrés avec Eviation Aircraft, lors du JEC 2017, et la livraison d’Alice, il s’est écoulé quinze mois, un temps très court dans le domaine de l’aéronautique. Cela a été un vrai challenge tant au niveau des moyens que des ressources qu’il a fallu mettre au service de notre client. Et il a été couronné de succès, puisque l’avion a fait partie des 100 innovations de l’année 2019 sélectionnées par Time », explique Yann Penfornis, directeur général de Multiplast.
Alice a été présenté pour la première fois au Salon du Bourget 2019. Photo Jean Marie Liot.
Ce succès ne s’est pas limité aux prestigieuses colonnes du magazine, puisque la compagnie américaine Cape Air, basée à Hyannis, dans le Massachusetts, a été la première à passer commande de dix appareils. La collaboration avec Multiplast se poursuit : deux autres fuselages sont en cours de drapage pour une livraison en fin d’année, leur construction monopolisant une douzaine de personnes en continu. En vue de son exploitation commerciale à partir de 2022, l’avion, qui a une autonomie de 800 km et dont la vitesse de croisière est de 440 km/h, est en cours de certification auprès de la FAA, l’administration américaine en charge de l’aviation civile.
Une étape décisive pour Eviation Aircraft, mais également pour Multiplast : « Notre objectif est, une fois la certification obtenue, de se mettre en position auprès du client de faire la fabrication en série. Pour cela, nous avons d’ores et déjà sécurisé un terrain d’un hectare à côté du chantier qui nous servirait à construire un nouveau hall pour produire les fuselages en série, avec les robots de drapage de l’entreprise lorientaise Coriolis Composites. » Autant dire que cela permettrait à l’activité aéronautique de Multiplast, développée depuis une quinzaine d’années, de prendre son envol: « C’est la première fois qu’on est proche d’une production en série, confirme Yann Penfornis. Pour nous, c’est un enjeu industriel majeur. »
VENDÉE GLOBE
Trois paires de foils d’IMOCA en un an pour Multiplast
En plus d’avoir fabriqué tous les foils monotypes des Figaro Bénéteau 3 (98 paires au total, entre septembre 2017 et octobre 2019), Multiplast a été retenu par trois équipes IMOCA pour construire des foils de 60 pieds dans la perspective du prochain Vendée Globe. Première commande au cours de l’hiver 2018-2019 : les foils de MACSF, implantés sur le plan VPLP-Verdier d’Isabelle Joschke (bateau mis à l’eau en 2007). Le chantier a ensuite livré les appendices du nouveau Corum, dernier IMOCA de nouvelle génération (plan Juan Kouyoumdjian), et ceux de Seaxplorer-Yacht Club de Monaco (plan VPLP-Verdier de 2015), construits dans les moules de ceux de MACSF pour Boris Herrmann.
Test de flexion de foil Imoca sur le banc Multitech - Photo Multiplast
« Pour Corum, le projet a commencé à la fin du mois de septembre dernier, explique Samuel Napoléoni, project manager chez Multiplast. Nous avons commencé par construire un nouveau jeu de moule, terminés mi-novembre, nous avons alors enchaîné sur la fabrication, qui se fait en deux cuissons, en autoclave. Nous avons ensuite procédé au démoulage, aux finitions des bords d’attaque et de fuite, avant les opérations de peinture. » Les foils ont été livrés début mai alors même que le chantier travaillait dans le respect des gestes barrières liés au Covid -19. Pas simple !
Pour Multiplast, qui avait déjà par le passé produit des appendices (dérives, safrans…) pour des bateaux de course, ces foils de nouvelle génération constituaient un défi technique important : « Du fait des épaisseurs, de la forme et de la dimension des pièces, ces foils créent de nouvelles problématiques, ça nous pousse plus loin dans tout ce qui est dossier de fabrication. Par exemple, il y a une dizaine d’années, nous découpions tout à la main, alors qu’aujourd’hui tous les plis sont découpés numériquement, cela nous fait gagner du temps et de la matière tout en étant, encore plus précis. On découvre ainsi plein de petites subtilités techniques et on va plus loin dans tout ce qui est mise en œuvre », explique Samuel Napoléoni.
Qui espère bien qu’après avoir « mis le doigt dans l’engrenage », le chantier vannetais continuera à produire ces grands appendices : « Pour nous, c’est un marché naissant très intéressant, parce que très technique avec une forte valeur ajoutée. »
EN BREF
- Les maxi-trimarans Spindrift et Idec Sport rejoindront Multiplast pour leur chantier d’été.
- 24 ans après la mise à l’eau du catamaran Magic Cat, construit par Multiplast sur plans de Gilles Ollier, son équipage vient de commander une nouvelle dérive. Livraison prévue en septembre.
- Plasteol, société du Groupe Carboman en charge de l’entretien des pales d’éolienne, recherche des techniciens pour l’entretien de pales sur sites. Personnes ayant le vertige s’abstenir ! Pour postuler, c’est ici : https://plasteol.fr/recrutement
- Multiplast dispose d’un slot de construction pour 1, 2 ou 3 Class40 à partir du mois d'août. Contact : Cette adresse e-mail est protégée contre les robots spammeurs. Vous devez activer le JavaScript pour la visualiser.
DANS LE GROUPE CARBOMAN
« L’aéronautique est un choix stratégique et une obligation pour Décision SA »
Longtemps spécialisée dans le nautisme, Décision SA, filiale du Groupe Carboman, concentre désormais son activité dans l’aéronautique, en particulier dans l’univers des Electric vertical take-off and landing aircrafts - “Evtol” dans le jargon - véhicules urbains volants de demain. Son directeur général, Grégoire Metz, explique ce tournant stratégique pour l’entreprise suisse.
Depuis quand Décision SA s’intéresse-t-elle au marché des Evtol ?
Depuis plus de deux ans, cela nous paraissait la suite logique du projet Solar Impulse, qui nous a ouvert beaucoup de portes. La problématique est similaire : construire des structures extrêmement légères pour embarquer des charges les plus importantes possibles. Nous faisons des pièces pour des prototypes, dont certains tournent déjà, mais je ne peux pas en dire plus, ce sont des projets extrêmement confidentiels sur lesquels nous avons des clauses de confidentialité draconiennes.
© Solar Impulse/Rezo.ch. Le projet Solar Impulse a ouvert beaucoup de portes à Décision SA.
La bascule vers l’aéronautique est donc un vrai choix stratégique pour l’entreprise...
C’est un choix mais aussi une obligation, dans le sens où la main d’œuvre coûte un peu plus chère en Suisse, ce qui nous a obligés à nous spécialiser dans des univers extrêmement pointus, porteurs de beaucoup de valeur ajoutée. Aujourd’hui, le prototypage aéronautique représente 80% de notre activité. L’enjeu, pour une société comme la nôtre, c’est à la fois de construire des prototypes, mais aussi d’être présente sur le futur marché des pièces de série très légères dont les coûts de production se rapprocheront de ce que l’on voit dans l’automobile.
Quelles conséquences cela a-t-il sur vos outils de production ?
Cela nous oblige à suivre le mouvement de tous les développements technologiques, les impressions 3D, les thermoplastiques… Dans l’année à venir, je n’ai pas de doutes que nous aurons fait des acquisitions de technologies qui nous permettront d’être présents sur ces marchés de niche, c’est en tout cas tout l’enjeu des décisions que nous allons prendre dans les six prochains mois.